De toute éternité sa mère avait aimé rajouter quelques écorçures de
citron dans les sauces aux champignons qui accompagnent la viande. L'arôme pointu frappe ainsi le
palais en de minuscules chiquenaudes agréablement surprenantes puis se
dilue... s'éloigne, désamorcé par la viande goûteuse, les morilles et ce
qui lie le tout, la sauce. Ensuite, une raisonnable rasade d'un aimable
beaujolais efface les images gustatives et installe l'astringence un
peu rude du pinard avant d'exposer, une fois la gorgée ingurgitée, une
palette de sensations qui apparaissent, se recouvrent, se découvrent,
démasquant de nouvelles subtilités, toujours plus fines à mesure que la
salive reconquiert son territoire. En principe ce plaisir n'a pas de
fin, il suffit de reprendre une bouchée de nourriture pour, par
contraste, recréer une sensation nouvelle.
in : Millar Gaichel, Monsieur Temps et la race humaine
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